Le potentiel des carburants alternatifs et leurs possibilités de stockage

19.12.2023 Le remplacement des carburants fossiles par des formes d'énergie alternatives se justifie rationnellement. L'augmentation mondiale de la concentration de CO2 dans l'air a été prouvée par des mesures techniques. Lors de la mat-conference.ch, les experts ont discuté des sources d'énergie qui alimenteront à l'avenir les véhicules routiers, les navires et les avions, sur terre, sur mer et dans les airs. Voici un aperçu des conclusions de la conférence.

Lorsqu'en novembre, les leaders de la recherche et du développement suisses se rencontrent à l'occasion de la mat-conference.ch (Mobility and Transportation) annuelle, un bouquet d'innovations techniques est présenté. Les exposés montrent aux participants à la conférence des approches de solutions techniques pour relever les défis et canaliser les idées. Le fait que l'accent ne soit pas uniquement mis sur les véhicules routiers, mais également sur les navires, les avions, les bus, les trains ou d'autres modes de transport, témoigne de la haute capacité d'innovation et du large éventail des hautes écoles suisses. Cependant, des représentants de l'industrie présenteront également de nouveaux développements.

Blocs thématiques 2023

Lors de la conférence du 7 novembre 2023, les intervenants se sont concentrés sur les énergies alternatives et donc sur les variantes de carburant. Afin de faire progresser l'électromobilité, la Suisse a besoin de beaucoup plus d'électricité propre: 70 à 90 TWh supplémentaires d'électricité renouvelable doivent être mis à disposition et 30 à 60 TWh de sources d'énergie synthétiques, renouvelables et chimiques sont nécessaires pour faire avancer la transition énergétique dans le secteur des transports. La décarbonisation et la défossilisation ne peuvent être réalisées qu'au prix de gros efforts. La priorité absolue est donnée à l'énergie solaire. La raison : ce n’est qu’avec l’apport d’énergie solaire que l’énergie électrique peut être fournie de manière décentralisée et locale pour promouvoir l’électrification de la mobilité individuelle. L'extension du réseau ou le développement d'autres sources d'électricité renouvelables (par exemple de nouvelles centrales hydroélectriques au fil de l'eau) prend tout simplement trop de temps. La Suisse dispose d'un grand potentiel: environ 1100 kWh d'énergie électrique par m2 de surface photovoltaïque et par an sont réalisables. Ce n'est certes pas le top en termes de rendement. Dans des régions désertiques comme Oman, 2200 kWh/m2/an sont possibles. En conséquence, l'énergie électrique doit logiquement être produite en Suisse et les carburants synthétiques importés de l'étranger.

La finitude des sources d'énergie fossiles oblige les gens à miser sur des alternatives. En matière d'énergie, l'offre et la demande jouent un rôle important. Tant que l'énergie fossile sera bon marché, les alternatives auront du mal à se développer. La simple économie de marché pour accélérer ce phénomène : un prix mondial du CO2 sur les émissions pourrait accélérer le changement, mais il est difficile, voire impossible, de le mettre en œuvre. Ce que les intervenant-e-s ont démontré-e-s à l'unisson, c'est qu'il n'y a pas qu'une seule solution: le renoncement fondamental ou la limitation de la mobilité (ce qui va à l'encontre des positions fondamentales libérales), le développement de l'électromobilité, la promotion de l'énergie, de l'hydrogène ainsi que des possibilités de power-to-X et de stockage de chaleur doivent être mis en œuvre.

A titre d'exemple, l'orateur Philipp Haudenschild a montré comment les CFF entendent faire fonctionner les locomotives et la flotte de générateurs de secours actuellement alimentés par des énergies fossiles en émettant moins de CO2 grâce à l'utilisation d'huile végétale hydrogénée et donc de diesel biosourcé. L'HVO (Hydrotreated Vegetable Oil) a le potentiel de réduire les émissions de CO2 des CFF jusqu'à 85%, d'abord en tant qu'additif au diesel, puis en tant que substitut. La quantité disponible sur le marché est toutefois limitée.

Dans le domaine de l'aviation également, des recherches sont menées pour trouver des alternatives au kérosène fossile et des possibilités d'utilisation sont testées. Urs Thomann, du constructeur aéronautique suisse Pilatus, a montré le défi à l'aide de quelques chiffres : en 2019, l'aéroport de Zurich a fait le plein de 1,4 million de tonnes de Jet A-1, le carburant conventionnel des avions, le kérosène. À 43,1 GJ/t, cette quantité de kérosène contient 61,6 PJ d'énergie. En supposant une efficacité optimiste de 80 % du processus Power-to-Liquid, 77 PJ d'électricité sont nécessaires pour produire cette quantité de carburant de manière synthétique. Cela correspond à un prélèvement continu d'électricité sur le réseau d'une puissance de 2,44 GW, soit plus que la puissance de production des centrales nucléaires de Beznau et Gösgen réunies. Produire des carburants synthétiques, c'est-à-dire des e-fuels, dans une telle quantité en Suisse n'est tout simplement pas réalisable. Par conséquent, les idées visant à augmenter la production d'e-fuel en Suisse pour l'essence et le diesel sont utopiques. Les quantités d'électricité nécessaires pourraient être mises à disposition de manière plus efficace dans les régions ensoleillées du monde.

Le talon d'Achille de l'approvisionnement énergétique de la Suisse est et reste la production d'électricité propre. En 2019, les Suisses ont consommé 221 PJ (61,5 TWh) d'énergie électrique. La croissance de la mobilité électrique routière ne peut être assurée que par le développement de la production photovoltaïque ou d'autres productions renouvelables. Une réflexion importante à ce sujet : la distance moyenne parcourue par jour est d'environ 35 km sur les 600 km d'autonomie moyenne des BEV. De plus, ces véhicules restent stationnés sur une aire de stationnement pendant plus de 90% du temps. Une maison individuelle peut être alimentée pendant environ quatre jours par une batterie de véhicule HT. Si la capacité de stockage du parc de véhicules BEV attendu était activement utilisée, elle serait environ 2x plus importante que toutes les centrales de pompage-turbinage de Suisse réunies. La production d'électricité est régularisée, transformant ainsi l'électricité "volatile" en "énergie de base". Les différences entre le jour et la nuit ainsi que les coupures d'électricité de plusieurs jours peuvent également être comblées. Moins d'importations seraient nécessaires en période de prix de marché élevés. Toutefois, la compensation pour l'utilisation du stockage de la batterie des BEV privées n'est pas encore clarifiée.

Les véhicules rechargeables de l'extérieur doivent, dans la mesure du possible, pouvoir être rechargés à des stations de recharge privées sur des places de stationnement existantes à domicile. La recharge à domicile correspondra à l'avenir également au besoin des propriétaires de véhicules rechargeables de l'extérieur. Pour ce faire, toutes les places de stationnement privées dans les immeubles d'habitation doivent être équipées d'une infrastructure de recharge privée. D'ici 2035, jusqu'à 2 millions de points de recharge privés devraient voir le jour en Suisse. Le développement de l'infrastructure de recharge privée dans les bâtiments ne s'improvise pas. En plus d'incitations, il est nécessaire d'avoir une sécurité en matière de planification et d'investissement.

En 2035, 400'000 à 1'000'000 de véhicules rechargeables de l'extérieur en Suisse ne disposeront d'aucune possibilité de recharge privée (à domicile ou sur le lieu de travail). Pour les détenteurs de véhicules sans places de stationnement privées et sans possibilité de recharge privée, il faut un réseau de recharge accessible à tous, si possible à proximité du domicile. Une électrification poussée nécessite une couverture de base généralisée en infrastructures de recharge accessibles à tous (pour la recharge à destination ou la recharge rapide en route). D'ici 2035, la demande en points de recharge accessibles à tous en Suisse augmentera entre 19 000 et 84 000, dont 11 000 à 23 000 points de recharge d'au moins 50 kW.

Dans tous les cas, un mélange de différentes options de recharge sera nécessaire en Suisse (recharge à domicile, sur le lieu de travail, dans le quartier, à destination et recharge rapide). L'étendue et l'importance du réseau de recharge accessible à tous varieront selon les régions. Pour que l’électromobilité fasse partie intégrante de la solution du futur système électrique suisse, les véhicules rechargeables de l'extérieur doivent en premier lieu se recharger de manière flexible (en termes de puissance et de moment) pendant les longues périodes d’immobilisation. Les processus de charge doivent pouvoir être contrôlés par le biais d'incitations tarifaires et de la commercialisation de la flexibilité. La capacité de la batterie nécessaire à la mobilité en 2030 est sept fois supérieure à celle de 2022. L'électrification du secteur des transports progresse grâce à des stratégies de soutien politique. Le recyclage et l'économie circulaire associée sont des stratégies clés pour promouvoir la durabilité de la chaîne d'approvisionnement/de valeur. Ce n'est qu'avec des données de durée de vie disponibles qu'il est possible de parvenir à une économie circulaire et de prolonger la première durée de vie de la batterie.

Exposés

Les exposés de l'édition 2023 peuvent être consultés sur mat-conference.ch.

MaT-Conference 2024

La prochaine édition aura lieu le 6 novembre 2024.
Nous nous réjouissons de votre participation. Les billets sont disponibles dès maintenant sur mat-conference.ch.

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