Un laser pour guérir les yeux

07.02.2019 Le HuCE-optoLab de la BFH collabore étroitement avec l’industrie locale, par exemple sur des solutions laser pour traiter les maladies des yeux. Un nouveau dispositif pourrait donner une lueur d’espoir aux patients souffrant de troubles de la vue.

En visitant le HuCE-opto- Lab du centre BFH Technologie en sport et médecine, des étudiants de Christoph Meier construisent un spectromètre pour mesurer les longueurs d’onde, un autre groupe se familiarise, sous l’égide du professeur de physique et optique de la Haute Ecole spécialisée bernoise (BFH), avec le laser OCT. OCT est synonyme de tomographie par cohérence optique – et d’un monde nouveau. Les premiers projets de recherche avec l’industrie montrent que le potentiel de la technologie laser est très grand. A l’instar de la tomographie par ultrasons, elle enregistre des images en 3D du corps. Commel’explique le responsable du laboratoire, «nous avons couplé un laser de traitement vert de la société Meridian, de Thoune, à un appareil OCT standard de l’entreprise allemande Heidelberg Engineering». La machine «Heidelberg Spectralis » ainsi modifiée pourrait nettement améliorer le traitement des maladies des yeux. Pourrait, car l’autorisation pour des traitements sur les humains n’a pas encore été accordée. Le projet est financé par le Fonds national suisse.

Christoph Meier

Éviter les dommages collatéraux

Pour comprendre le fonctionnement des lasers, faisons un petit détour par l’endroit où ils agissent: dans l’oeil. Certaines maladies de la rétine résultent d’un dysfonctionnement d’une membrane appelée RPE. Celle-ci a pour tâche de réguler l’entrée et la sortie des liquides vers les cellules visuelles. Une nouvelle thérapie, appelée thérapie sélective de la rétine (SRT), est à l’étude pour traiter ces maladies. Un laser très spécial détruit de manière ciblée cette membrane de quelques millièmes de millimètre d’épaisseur. Pendant le processus de guérison qui s’ensuit, le corps reconstruit la membrane qui fonctionne à nouveau correctement. Le défi technique, c’est le dosage du laser, car l’énergie émise devrait être adaptée individuellement à la membrane respective de chaque oeil traité pour obtenir des résultats optimaux. Actuellement, la thérapie laser traditionnelle endommage aussi les photorécepteurs sains situés autour de la membrane et l’oeil ne peut pas les régénérer. Le nouvel appareil de l’entreprise Meridian permet de suivre en temps réel l’effet du laser et d’ajuster son dosage. Les tests effectués sur des yeux de porc fraîchement sortis de l’abattoir ont donné des résultats beaucoup plus précis et sans dommages collatéraux. A l’heure actuelle, le projet en est à la dernière étape, avant les essais pratiques sur l’homme. Afin de pouvoir mener à bien l’étude sur des patients, les partenaires de recherche ont encore besoin de l’accord de Swissmedic. Les ophtalmologues de l’hôpital de Berne traiteront les patients avec la thérapie laser combinée.

Transfert de savoir à l’économie

Après les explications médicales dans le HuCE-optoLab, Christoph Meier évoque l’étroite collaboration des partenaires de projet: Heidelberg Engineering, qui a mis à disposition un dispositif et amodifié le logiciel, le collaborateur de la BFH Christian Burri, qui s’est rendu deux fois à Lübeck, en Allemagne, pour ajuster et améliorer l’appareil OCT qui interfère mécaniquement dans l’optique de l’appareil de Heidelberg, et Markus Stoller, un ancien assistant BFH qui travaille depuis près d’un an chez Meridian. Le transfert de savoir de la BFH aux entreprises privées passe souvent par des collaborateurs de la haute école qui ont été impliqués dans un projet de recherche avec l’entreprise et qui l’ont rejointe, une fois leur diplôme en poche. Christoph Meier est content de «perdre» des collaborateurs de cette manière. Les deux parties profitent d’un vaste réseau et il n’est pas impossible que les anciens collaborateurs se tournent à nouveau vers la BFH avec un nouveau projet. Chaque année, le seul HuCE-optoLab reçoit en moyenne de l’économie privée une à deux demandes pour des projets de recherche OCT. S’agissant du projet de recherche décrit ci-dessus, on ne sait pas encore quand il sera terminé. Heidelberg Engineering et Meridian veulent mettre le dispositif OCT sur le marché. L’entreprise allemande peut ainsi étendre son appareil standard OCT et celle de Thoune veut implanter son laser sur le nouveau marché SRT. De tels projets, ou celui mené avec l’entreprise Ziemer – un projet OCT qui a remporté le Swiss Medtech Award pour un système laser femtosecondes – motivent les collaborateurs de l’optoLab. Car mener des développements en collaboration avec des partenaires industriels des produits dotés de nouvelles technologies, cela crée finalement aussi des emplois.

Matériel de labo à louer

Il convient également de mentionner l’aspect lié aux services de la BFH: l’infrastructure financée par les fonds publics offre non seulement une formation moderne aux étudiants, mais aide aussi l’économie. Les entreprises de la région peuvent emprunter pour leurs propres besoins du matériel à la BFH. «Qu’il s’agisse d’une caméra infrarouge, autrefois très chère, ou d’un spectromètre, régulièrement utilisé par une entreprise locale – la location de matériel soulève souvent des questions intéressantes pour les travaux de bachelor», explique Christoph Meier. Parallèlement à ces projets, le HuCE-optoLab étudiera d’autres possibilités d’application de la technologie OCT: «Celle-ci a révolutionné l’ophtalmologie», déclare le professeur. Avant, l’ophtalmologue ne pouvait pas faire une vue en coupe d’une rétine vivante, maintenant on peut le faire,même sans anesthésie. Avec ces méthodes de mesure non destructives, Christoph Meier voit des applications de niche dans des domaines autres que l’ophtalmologie, très intéressantes pour la BFH, car les grands acteurs s’affirment moins sur ces marchés. Jetant un coup d’oeil sur l’avenir, il relève qu’en plus de la collaboration avec le programme de soutien Innosuisse, celle d’Eurostars prend de plus en plus d’importance. Celle-ci soutient des projets transfrontaliers, principalement entre des pays européens. Un collègue de travail de Meier du HuCEoptoLab lance un nouveau projet avec Hyperspektro Imaging: une caméra n’enregistre pas seulement, comme d’habitude, trois couleurs, c’est-à-dire trois longueurs d’ondes, mais 1000 pour chaque pixel. «Chaque pixel aurait alors un spectromètre – un domaine d’application passionnant», souligne le professeur.

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